Aujourd’hui, demain : quels usages pour l’hydrogène ?
L’hydrogène a tout pour devenir un vecteur majeur de la décarbonation de l’économie mondiale à condition de parvenir à le produire massivement sans ressources fossiles. Ses propriétés le rendent, en effet, très complémentaire des énergies renouvelables intermittentes, et utile pour des secteurs difficiles à électrifier – comme l’industrie lourde et le transport à longue distance.
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Industrie : quels usages pour l'hydrogène ?
L’hydrogène : un composant-clé pour l’industrie
Actuellement, pratiquement toute la production mondiale d’hydrogène est utilisée par des industries pour lesquelles il est un ingrédient essentiel de leurs processus. En s’approvisionnant avec de l’hydrogène « bas carbone », ces industries connaîtraient néanmoins une amélioration significative de leur bilan carbone. Sont concernés au premier chef la fabrication d’engrais (via la synthèse d’ammoniac), le raffinage d’hydrocarbures, la métallurgie et la synthèse du méthanol.
Industrie et aéronautique : l'hydrogène comme combustible décarboné
L’hydrogène est aussi directement exploitable en le « brûlant » comme on le fait avec les hydrocarbures. C’est un domaine technologique ancien et bien maîtrisé : l’hydrogène (associé à l’oxygène sous forme d’ergol) est par exemple le carburant le plus utilisé pour les fusées spatiales. L’avantage est que sa combustion avec l’oxygène produit de l’eau, et non du CO2 comme les moteurs thermiques classiques. Le grand panache blanc observé à chaque décollage d’Ariane n’est donc rien d’autre que… de la vapeur d’eau !
Cet usage de l’hydrogène sous forme de combustible pourrait se développer avec relativement peu d’ajustements techniques – dans des secteurs difficiles à décarboner : turbines d’aéronefs, hauts-fourneaux et fours industriels… En la matière, le défi est avant tout logistique : comment assurer son approvisionnement massif ? Financier aussi : quel sera le coût de l’hydrogène « vert » ? Et enfin réglementaire : comment adapter les opérations à cette nouvelle énergie pour les rendre parfaitement sûres ?
VINCI, Ariane et l’hydrogène : une histoire déjà longue !
À travers Cegelec Space (VINCI Energies), partenaire historique de la base spatiale de Kourou, en Guyane, le Groupe dispose de plus de 50 ans d’expérience dans les systèmes fluides liés à l’hydrogène : le carburant utilisé (sous sa forme liquide) par les fusées Ariane.
Stockage d'électricité : la solution hydrogène
Le grand intérêt de l’hydrogène réside également dans son utilisation, non pas comme « source », mais comme « vecteur » d’énergie. Cette approche s’avère particulièrement prometteuse pour compenser le problème d’intermittence des énergies renouvelables (ENR) comme l’éolien et le photovoltaïque. Schéma aujourd’hui le plus fréquemment envisagé et développé : le parc ENR connecté à un électrolyseur. En période de forte production, son excédent d’électricité sert à produire de l’hydrogène, qui peut être stocké indéfiniment. Dans les périodes de faible production ou de forte consommation, ce stock d’hydrogène est reconverti en électricité à l’aide d’un générateur, laquelle est injectée dans le réseau de façon à garantir un approvisionnement continu et largement prévisible.
HyDeal : un cas d’école en Espagne
Joint-venture associant notamment le métallurgiste ArcelorMittal et le fabricant d’engrais Fertiberia, HyDeal est un un projet ambitieux dans le domaine de l’hydrogène. L’objectif est de construire un vaste parc solaire de 9,5 GW, associé à 7,4 GW d’électrolyseur en vue de produire plus de 300 000 tonnes d’hydrogène « vert » par an en 2030. VINCI est au cœur de ce projet emblématique, au travers de VINCI Construction et sa marque spécialisée HyFinity ainsi que, côté énergie, l’implication de Cobra IS, expert en ingénierie industrielle espagnol récemment intégré au Groupe.
Hydrocarbures : de l'hydrogène pour un bilan neutre en carbone
Solutions prometteuses à court et moyen terme : les technologies dites « Power-to-Gas » et « Power-to-e-Fuel ». Il s’agit ici de combiner de l’hydrogène « vert » avec du CO2 prélevé dans l’atmosphère ou capté à la sortie des usines, en vue de fabriquer des hydrocarbures ou gaz de synthèse. Outre leur très faible bilan carbone, ceux-ci ont l’avantage d’être très proches des gaz et carburants traditionnels.
Jupiter 1000 : le Power-to-Gas en action
Actemium (VINCI Energies) est partie prenante du projet Jupiter 1 000 initié par GRTgaz. Mis en service en 2020 à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône, France), il s’agit d’un démonstrateur industriel de production de méthane de synthèse, via un électrolyseur alimenté par un parc ENR local, associé à une unité de captage de CO2 installée sur les cheminées de l’usine sidérurgique voisine. Le méthane synthétisé est alors injecté dans le réseau de gaz afin d’être utilisé pour un usage industriel ou domestique. L’atome de carbone émis une première fois dans l’atmosphère puis capté est ainsi réutilisé. Le bilan carbone du gaz produit voit sa phase amont (production) d’émissions de CO2 largement réduite.
Mobilités : se déplacer grâce à l'hydrogène
Qu’est-ce qu’une pile à combustible hydrogène ?
Au lieu de brûler l’hydrogène, il est possible de l’utiliser dans une pile à combustible pour produire de l’électricité. Le principe est le même que la pile électrique : c’est une réaction d’oxydoréduction qui génère du courant entre deux électrodes. Cette réaction inverse de l’électrolyse ne produit que de l’eau. Et ses rendements sont nettement supérieurs à ceux des groupes électrogènes classiques, ce qui en fait un vecteur à fort potentiel pour de nombreuses applications, notamment dans la mobilité.
Mobilités routières à hydrogène
Il existe déjà plusieurs modèles de voitures à hydrogène, mais leur place reste très marginale sur le marché mondial : 17 000 ventes en 2021, contre plus de 6,5 millions pour les voitures électriques en plein « boom ». L’Union européenne prévoit néanmoins de déployer, d’ici à 2030, des stations à hydrogène tous les 200 km le long de ses principaux axes routiers. Ces dernières bénéficieront avant tout aux futures flottes de véhicules lourds (camions, cars et bus), pour lesquels l’hydrogène représente une solution potentiellement plus avantageuse que l’électrique en termes d’autonomie. VINCI Concessions a par ailleurs réalisé en 2022 ses premiers investissements dans la mobilité routière à hydrogène, avec une participation, à hauteur de 10 millions d’euros, à la levée de financement de la société H2 Mobility, leader des stations de rechargement hydrogène pour la mobilité routière en Allemagne. VINCI Concessions a également réalisé un investissement de 15 millions d’euros dans Hype, première plateforme intégrée de mobilité automobile hydrogène en France, société dont VINCI Energies est le partenaire exclusif pour la construction de nouvelles stations de production et de distribution d’hydrogène en Ile-de-France.
Décarboner l’économie, c’est décarboner la route à commencer par l’autoroute, qui concentre le trafic et donc les émissions. Tout notre défi consiste à transformer notre réseau pour accueillir des véhicules bas carbone. Selon nous, à terme, l’hydrogène est appelé à cohabiter avec l’électrique.
Christophe Hug, directeur général adjoint en charge de la maîtrise d'ouvrage chez VINCI Autoroutes
Mobilités aériennes à hydrogène
Le défi de l’hydrogène est sans doute plus difficile pour l’aéronautique que d’autres secteurs de la mobilité : il suppose de développer des architectures d’aéronefs radicalement différentes, capables d’embarquer des réservoirs d’hydrogène liquide à -253°C, ou des piles à combustible suffisamment compactes et puissantes pour hisser un gros-porteur à 15 000 mètres d’altitude. Ces technologies progressent cependant rapidement, et intéressent de nombreux acteurs. Le motoriste Safran a par exemple lancé le programme Explore H2 pour travailler avec des start-up spécialisées dans le domaine. Et Airbus a, de son côté, dévoilé le concept ZEROe : une gamme de trois aéronefs propulsés à l’hydrogène, dont le premier est attendu dès 2035. L'arrivée prochaine des avions à hydrogène suppose également une adaptation importante des aéroports. VINCI Airports (VINCI Concessions) poursuit d'ailleurs son plan d’action avec l'ouverture prochaine d'une première station d’hydrogène gazeux à l'aéroport de Lyon-Saint Exupéry, un service de bus à hydrogène à l’aéroport international du Kansai au Japon, un projet de flotte d’exploitation aéroportuaire à hydrogène aux aéroports du Portugal, et un partenariat avec Air Liquide, Copec et Colbún à l’aéroport de Santiago du Chili.
L’avion à hydrogène a déjà volé…
À la fin des années 1980, les soviétiques ont développé le Tupolev Tu-155 : cet avion de ligne expérimental disposait de trois turboréacteurs, dont l’un conçu pour fonctionner soit avec de l’hydrogène liquide, soit avec du gaz naturel liquéfié – un programme d’essai finalement abandonné après la chute de l’URSS.
Mobilités ferroviaires à hydrogène
Le train est l’un des débouchés évidents pour les usages de l’hydrogène. Les contraintes y sont moindres pour équiper les locomotives en volumineux réservoirs à hydrogène ou piles à combustibles. Cela offrirait une alternative économiquement et climatiquement très avantageuse aux nombreuses locomotives diesel actuellement en service. Le constructeur Alstom fait figure de pionnier en la matière en ayant mis en service en Allemagne le tout premier train à pile à hydrogène au monde, sur une ligne voyageurs de plus de 1 000 km.
Mobilités maritimes à hydrogène
Une part majeure du commerce mondial dépend de navires extrêmement polluants et émetteurs de CO2 en raison de leurs gigantesques moteurs diesel. Les besoins en énergie et en autonomie des géants de mers dépassant largement les capacités de batteries classiques – et à moins d’équiper toute la flotte mondiale en propulsion nucléaire ! –, l’hydrogène a une carte à jouer dans ce domaine clé pour la décarbonation de l’économie. Les technologies sont encore balbutiantes, mais chantiers navals et armateurs multiplient les prototypes et démonstrateurs, à l’image du projet Energy Observer 2, associant notamment Air Liquide et CMA-CGM. D’autant plus que certains moteurs diesels peuvent être convertis pour l’usage de l’hydrogène ou de ses dérivés comme le méthanol ou l’ammoniac.
Un premier succès « H2 » pour Barillec Marine
Cette entreprise de VINCI Energies a conçu pour le compte de Sogestran l’usine électrique de la première barge à hydrogène naviguant sur la Seine, et travaille avec d’autres armateurs sur des projets de dragues et de navires (crew transfer vessel) à propulsion hybride hydrogène.
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