visuel interconnexions énergétiques sous-marines
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Interconnexions énergétiques sous-marines : une électricité durable sans frontière

Face à un contexte géopolitique mondial incertain, les États sont en quête de solutions qui garantiront tout à la fois leur souveraineté énergétique et la durabilité de leurs infrastructures. Dans cette optique, les interconnexions transfrontalières sous-marines apparaissent comme des artères vitales de la répartition de l’énergie. Plongée dans ces projets technologiques, économiques et politiques titanesques, en plein cœur de la transition énergétique. 

Une électricité sans entrave  ? 

Jouant à la fois un rôle de stabilisateur du réseau et de solution d’optimisation de l’usage des énergies renouvelables, les interconnexions sous-marines sont devenues une composante clé des infrastructures énergétiques. Ces câbles installés dans le fond des mers ou des océans sont capables de résister à des pressions extrêmes ainsi qu’à des environnements hostiles. Véritables prouesses d’ingénierie, ces interconnexions sont conçues pour transporter l'électricité sur des distances allant jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres et assurent une transmission d'énergie continue entre les pays grâce à des centrales de conversion, installés à terre.  

Assurer la sécurité énergétique et l’intégration des énergies renouvelables 

L’utilité des interconnexions sous-marines résulte d'un besoin croissant en matière de sécurité énergétique et de diversification des sources d'énergie. En Europe, cette nécessité a été particulièrement mise en exergue récemment avec la guerre en Ukraine1.  

Dans un contexte de transition énergétique, les liaisons répondent à plusieurs enjeux majeurs : 

Interconnexion des réseaux électriques 

En reliant les réseaux de différents pays, ces câbles facilitent l'échange d'électricité, permettant ainsi de compenser les déficits temporaires, de gérer les pics de demandes et d'optimiser l'utilisation des ressources énergétiques disponibles. 

Intégration des énergies renouvelables 

Certaines énergies renouvelables, comme l'éolien et le solaire, sont par nature intermittentes. Les interconnexions sous-marines permettent de transporter l'énergie produite dans des zones où les conditions de production d’énergies renouvelables intermittentes sont favorables vers des régions où la demande est plus élevée, contribuant ainsi à une meilleure intégration de ces sources d'énergie dans le mix énergétique global. 

Les sites solaires ou éoliens peuvent être très éloignés des lieux de consommation. Leur production, bien qu’irrégulière, doit pouvoir rapidement et massivement être transportée.

Arnaud Gautier, chef d’entreprise chez Omexom Major Projects, filiale de VINCI  Energies.

Réduction de l'empreinte carbone du mix énergétique mondial 

En facilitant l'échange d'énergie renouvelable au-delà des frontières, ces interconnexions contribuent directement à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, en substituant l'électricité générée à partir de combustibles fossiles par des alternatives plus propres.

Un maillage électrique voué à s’étendre

Avec plus de 300 000 kilomètres de lignes de transport d’électricité à haute tension et la présence de 400 interconnexions, le maillage électrique européen figure parmi les plus développés au niveau mondial. Il assure l’accès à l’électricité à plus de 600 millions d’habitants2. Les liaisons NordBalt entre la Suède et la Lituanie et NorNed entre la Norvège et les Pays-Bas présentent chacune une capacité de 700 MW. La ligne franco-britannique IFA 2 est dotée d’une capacité d’1 GW soit l’équivalent de 500 000 foyers alimentés en permanence, ou bien encore : la puissance d’un réacteur nucléaire. Toutes contribuent à l’efficacité du marché de l’énergie en Europe. 

visuel interconnexion IFA2

Transporter l’énergie  : du courant continu au courant alternatif 

 

Pour éviter les déperditions d’énergie, les lignes sous-marines transportent du courant continu à très haute tension. Une fois arrivé à bon port, le courant doit être transformé en courant alternatif afin d’intégrer le réseau terrestre pour ensuite être distribué. Entre 2018 et 2020, les équipes de VINCI  Energies et de VINCI  Construction ont participé au projet de la nouvelle interconnexion sous-marine entre la France et l'Angleterre, IFA  2, en réalisant la station de conversion de courant côté français. 

D’autres projets significatifs fleurissent un peu partout dans le monde. En Amérique du Nord par exemple, 200 000 miles de lignes (≈ 322 000 km) et 35 interconnexions sont déployées entre les États-Unis et le Canada3. En Asie, l’ambitieux Asian Super Grid est à l’étude pour relier des pays comme la Chine, la Corée du Sud, l’Inde, le Japon ou encore la Mongolie et la Russie4 et compléter les interconnexions existantes. En Afrique, le projet potentiel de câbles transsaharien reliant l'Afrique du Nord à l'Europe serait un atout majeur pour renforcer l’ inclusivité énergétique.  

INELFE : une nouvelle interconnexion électrique stratégique entre la France et l’Espagne 

L’interconnexion électrique France-Espagne (INELFE) est le fruit d’une coopération entre les entreprises VINCI Energies, VINCI Construction, HITACHI Energy, Red Eléctrica et RTE pour relier les deux pays à travers le golfe de Gascogne.  

Ce projet de très grande envergure devrait être finalisé d’ici 2028. Il vise à déployer des câbles souterrains et sous-marins sur 400 km et deux centrales de conversion à leurs extrémités. Plus grand interconnecteur de courant continu en Europe, il apportera une capacité cumulée de 2 000 MW entre la France et l’Espagne, l’équivalent de la consommation de 2 millions de foyers (la ville de Paris par exemple).  

Les interconnexions sous-marines s’inscrivent pleinement dans la vision stratégique d’un avenir énergétique durable et en réseau. En surmontant les défis physiques et géopolitiques, elles ouvrent la voie à une coopération énergétique transfrontalière accrue, essentielle dans la lutte contre le changement climatique et dans la construction de la sécurité énergétique de demain.