Décarbonation des sites portuaires : comment arriver à bon port ?
Le transport maritime représente, selon l’Organisation maritime internationale, 3 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Très dépendant des énergies fossiles, le commerce maritime doit dès aujourd’hui se réinventer afin d’atteindre le zéro émission nette à l’horizon 2050. Parmi les nombreux leviers à activer, la décarbonation des ports est une étape clé. Quelles solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre des infrastructures portuaires ?
Le transport maritime et dans une moindre mesure le transport fluvial assurent aujourd’hui 80 % des échanges commerciaux internationaux en volume, selon l’Organisation mondiale du commerce. L’Organisation maritime internationale, qui dépend des Nations unies, a quant à elle révisé en 2023 sa stratégie pour atteindre le zéro émission nette aux alentours de 2050. Si l’essentiel de la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) du commerce maritime porte sur la substitution des carburants fossiles par des carburants renouvelables dans les navires, les infrastructures portuaires ont aussi leur rôle à jouer dans cet effort de décarbonation.
Des ports plus vertueux : le défi de l’OPS, solution d’électrification des quais
Les principales émissions liées aux ports sont à imputer aux moteurs des navires qui fonctionnent même lorsqu’ils sont à quai, et leur permettent d’utiliser leurs systèmes de bord, voire dans certains cas, de réfrigérer les containers. 60 % des émissions liées aux ports (11 % des émissions maritimes globales selon l’OCDE) seraient ainsi liées à l’usage des moteurs à quai. Pour remplacer leur utilisation et ainsi accélérer la décarbonation des ports, la principale solution consiste à embrancher les navires au réseau électrique terrestre afin qu’ils utilisent une énergie plus propre. Baptisés Onshore Power Supply (OPS), pour solutions d’alimentation à bord, ces aménagements constituent un levier puissant de décarbonation des infrastructures portuaires, sous réserve que le mix énergétique utilisé soit peu intense en carbone.
Fonctionnement de la solution Onshore Power Supply
Pour permettre aux navires de se brancher à quai, il est nécessaire d’installer une sous-station de distribution électrique ainsi qu’une centrale de conversion de fréquence : en effet, l’électricité utilisée sur un bateau nécessite une fréquence de 60 Hz, contre 50 Hz sur la plupart des réseaux terrestres.
L’électrification des navires à quai contribue également à réduire l’émission de certains gaz polluants dans l’air tels que les oxydes de soufre, les oxydes d’azote ou les particules fines. Dès le début des années 2000, le port de Göteborg, en Suède, a commencé l’électrification de ses infrastructures pour les navires. Les autorités portuaires estiment que le projet a permis de réduire de 1 200 tonnes par an les émissions de gaz à effet de serre et polluants du port.
Actemium, pionnier des solutions OPS
Aux Émirats arabes unis, deux sites portuaires - la base logistique de Mussafah et le port industriel de Ruwais - ont été électrifiés en 2022 par Actemium Emirates Projects, filiale de VINCI Energies. Actemium, a également remporté en 2022 un contrat pour la conception et la construction d’une solution OPS sur le terminal portuaire de Vlaardingen proche de Rotterdam aux Pays-Bas, offrant une capacité de 1,8 MW. L’entreprise compte continuer à développer cette technologie dans d’autres ports européens comme ceux d’Amsterdam, d’Anvers ou de Gand.
Des engins d’exploitation portuaire moins polluants
Autre levier pour améliorer le bilan carbone des ports : réduire les émissions de GES des engins utilisés sur les sites. Depuis 2023, des engins de manutention (une grue télescopique et un camion tracteur fonctionnant à l’hydrogène) sont testés en conditions réelles dans le port de Valence en Espagne. L’initiative s’inscrit dans le cadre du partenariat européen « Clean Hydrogen Partnership » et s’appuie sur de l’hydrogène vert produit grâce à des énergies renouvelables. L’enjeu est de tester la viabilité de tels engins à long terme.
La décarbonation des ports passe également par le recours à des motorisations alternatives pour les navires destinés à l’exploitation du port, comme les patrouilleurs, remorqueurs ou bateaux-pilotes. Le port d’Anvers, en Belgique, renouvelle progressivement sa flotte de bateaux de service dans le but de passer à des motorisations alternatives. Deux bateaux à motorisation hybride, un bateau à hydrogène et un dernier fonctionnant à l’éthanol sont d’ores et déjà en fonctionnement. Pour les autorités portuaires d’Anvers, le but de cette phase de test consiste à sélectionner la technologie propre la plus efficace.
Produire de l’énergie sur les sites portuaires
La production d’énergie bas carbone directement sur les sites portuaires recouvre diverses réalités. Le port de Brest est par exemple en train d’expérimenter la production d’énergie à partir d’un système photovoltaïque flottant sur l’un de ses bassins inutilisés. La production est estimée à 18 MWh par an et serait destinée à l’autoconsommation.
Le port de Barcelone a quant à lui établi un potentiel de production photovoltaïque de 120 GWh par an, ce qui correspond à 50 % de sa consommation d’électricité. Pour l’instant, le port a installé 43 MWh de panneaux solaires sur le toit des bâtiments destinés aux pêcheurs du port.
En novembre 2023, Haropa Port, l’entité publique qui rassemble l’ensemble des ports le long de la Seine (Le Havre, Rouen et Paris), a annoncé l’implantation d’une unité industrielle de production d’hydrogène bas carbone à Grand-Quevilly, en Seine-Maritime. L’unité sera capable, en 2029, de produire 50 000 tonnes d’hydrogène vert par an.
Les infrastructures portuaires ont également un rôle majeur à jouer pour accompagner la progressive substitution des carburants fossiles des navires par des solutions renouvelables ou bas carbone. En distribuant ou en produisant des énergies moins carbonées, Haropa Port a pour ambition de contribuer à la décarbonation de la filière maritime et fluviale. L’entité compte proposer sur ses sites des carburants de synthèse à partir de CO2 capté dans l’atmosphère qui pourront alimenter les navires qui desservent la vallée de la Seine.
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